Un nouveau « socle » pour une même politique
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La loi Fillon de 2005 a créé le « socle commun de connaissances et de compétences » basé sur cinq « piliers », auxquels en ont été ajoutés deux autres dès 2006. L’actuel gouvernement a repris à son compte ce principe rebaptisé « socle commun de connaissances, de compétence et de culture » et a redéfini cinq « domaines de formation ».
Nous avons critiqué de manière sévère et sans relâche le « socle » Fillon mais force est de constater que ses cinq premiers piliers avaient au moins un caractère disciplinaire. La version 2014 fait passer à la trappe toute référence aux disciplines enseignées.
Au-delà de ce changement cosmétique, c’est une même logique qui anime les deux versions du « socle ». L’ancien comme le nouveau ont des objectifs purement économiques :
- réduire le coût de l’éducation en réduisant les enseignements au minimum pour la majorité des élèves issus des milieux populaires ;
- répondre aux demandes du patronat qui souhaite substituer aux qualifications reconnues dans les conventions collectives des « compétences » définies par le seul employeur.
Nous ne sommes donc pas de ceux qui jugent le socle new look comme un « projet perfectible », « un changement de conception qui va dans le bon sens » ou « un texte progressiste ».
Le concept même de « socle » est condamnable. Il est surtout utilisé comme un levier pour accentuer encore le ravalement de l’école au service du patronat. Il se réduit à des "apprentissages" utilitaristes visant une meilleure employabilité des élèves issus principalement des classes populaires. Cela renforce encore une école à deux vitesses !
L’instrument de sa mise en œuvre, le livret personnel de compétences, dissout les savoirs par un émiettement de l’évaluation. Conformément à l’idéologie du management, ce n’est plus la connaissance qui est évaluée, mais des "compétences" parcellaires de l’individu dans un cadre normatif. La réduction annoncée du nombre d’items n’est qu’une concession en trompe l’œil, de pure forme, qui ne change rien au fond.
Au-delà du renforcement du tri social à l’école, le « socle » est également un outil pour dégrader les conditions de travail des personnels. Les enseignants voient se multiplier les réunions et tâches diverses. Même l’Inspection générale l’a reconnu dans un rapport d’août 2012 sur le livret de compétences : « la mise en place du socle et ses conséquences pédagogiques ont été la plupart du temps présentées comme très chronophages car tributaires d’un travail collectif difficilement compatible avec les contraintes et les conditions réelles de travail des enseignants ». Cela était également prévu par le rapport du député Grosperrin de 2010 qui jugeait qu’ « un enseignement et une évaluation par compétences imposent aux professeurs de mener un travail de coordination considérable » et proposait « une piste prometteuse […] allonger le temps de présence des enseignants du second degré dans les établissements, en incluant dans leur mission, aux côtés des heures de cours, qui ne seraient pas augmentées, mais diminuées, les tâches liées à la coordination pédagogique, aux travaux en petits groupes, à l’accueil des parents, à l’orientation, aux activités culturelles et artistiques, au tutorat des enseignants débutants, etc. » (proposition suivie d’un exemple de temps de service de 24 heures hebdomadaires).
Le « socle » s’inscrit donc dans les projets des gouvernements de droite comme de gauche pour détruire le statut des enseignants et pour alourdir la charge et le temps de travail (comme le permettra le décret Peillon-Hamon).
C’est pourquoi nous réaffirmons qu’il n’y a rien à défendre et à gagner dans la concertation mise en œuvre par le Ministère. Les demi-journées banalisées ne sont qu’une caution pour justifier un projet dont les grandes lignes et même les détails sont déjà écrits.