Entrée dans le métier : les jeunes collègues sous pression !
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Depuis la rentrée 2015, après obtention du CRPE, les PES (Professeurs des écoles stagiaires), en Seine Maritime, effectuent leur année de stage à mi-temps. Ils se relaient sur un même poste toutes les trois semaines alternant chacun trois semaines de stage, trois semaines de formation à l’ESPE.
Plusieurs profils de PES existent : les stagiaires ayant obtenu leur concours à l’issue de leur année de M1, ceux qui sont déjà titulaires d’un Master 2 (enseignement ou autre). Ces différents statuts induisent une formation différente. Alors que les premiers doivent impérativement valider leur M2 à la fin de l’année de stage, les autres suivent une formation « allégée » composée de quelques unités d’enseignements du Master. La charge de travail est donc lourde, surtout pour les collègues devant mener de front leur année de stage, la rédaction d’un mémoire et les autres travaux nécessaires à la validation du Master.
Au cours du stage, les PES sont suivis par un PEMF et un tuteur ESPE. Ceux-ci effectuent des visites conseils et deux visites évaluatives.
Ce dispositif place les jeunes collègues face à un certains nombres de difficultés au cours de cette année de stage.
AVANT LA PRISE DE FONCTION
Certains PES ne sont mis au courant qu’à la fin du mois d’août, de leur affectation. Ils font la connaissance du collègue avec qui ils partageront leur classe lors d’une semaine d’accueil organisée par l’institution. Celle-ci consiste principalement en une succession d’interventions magistrales et institutionnelles alors que l’urgence, une semaine avant la rentrée, serait de pouvoir travailler avec son binôme sur l’organisation de la classe et de la rentrée, de prendre contact avec l’équipe de l’école, de construire les programmations… Un accompagnement concret sur le déroulement de la rentrée imminente semblerait plus à même de répondre aux attentes des jeunes enseignants, anxieux à l’approche de leur première prise de poste. De plus, cette semaine d’accueil est présentée comme « obligatoire » mais elle se déroule pendant les vacances scolaire et n’est donc pas rémunérée ! La CGT-Educ’action demande que cette semaine soit laissée à la libre appréciation des collègues. À l’issue de cette semaine, il reste une demi-journée aux PES avant la rentrée officielle des enseignants pour faire connaissance avec leur binôme mais aussi pour se rendre dans leur école d’affectation et prendre contact avec leurs nouveaux collègues.
L’ANNÉE DE STAGE
Le stage se déroule ensuite en alternance, entre deux enseignants débutants. Ce qui n’est pas sans poser quelques problème : craintes des parents d’élèves, difficultés de coordination avec son binôme. Afin de permettre, soit-disant, d’aider à la coordination des collègues, une journée de « tuilage » a lieu avant chaque changement d’enseignant. Mais ce temps de concertation a lieu dans la classe, en présence des élèves. Aucun échange efficace, quant à la gestion et à l’organisation de la classe, ne peut réellement avoir lieu. Tout ce travail de coordination a lieu après la classe, sur le temps personnel des PES, auquel s’ajoute le temps de préparation des trois semaines à venir pour le stagiaire qui va reprendre la classe. À ces réunions non comptabilisées, s’ajoutent les temps de réunions obligatoires. En poste à mi-temps, les PES sont redevables de la moitié des 108h. Cependant, la pression de certaines équipes et la réalité de la vie de l’école imposent souvent aux PES d’assister à une majorité de réunions.
Enfin, le suivi des PES par leurs deux tuteurs est peu harmonisé. C’est aux tuteurs de déterminer le nombre des visites et les attentes des tuteurs varient… En effet, alors que certains PES sont visités plusieurs fois par période, d’autres ne le sont que le nombre minimum imposé par l’institution. Alors que les visites sont présentées comme un accompagnement à certains PES, d’autres tuteurs se montrent clairement comme des évaluateurs exigeants à toutes leurs visites. Enfin, il arrive que le PEMF n’ait pas du tout les mêmes exigences que son collègue de l’ESPE et que les collègues reçoivent des injonctions différentes voire contradictoires… À cela s’ajoute, éventuellement, les visites du CPC chargé de l’accueil des nouveaux collègues. On peut facilement imaginer que ce qui se présente comme une aide apporte plutôt de la confusion au jeune collègue.
LA FORMATION
La formation se déroule à l’ESPE lorsque les PES ne sont pas en classe. Ici encore, quelques nuages à l’horizon… Ceux-ci se dessinent principalement dans l’organisation de la formation : un emploi du temps qui change parfois de la veille pour le lendemain (ce qui ne facilite pas l’organisation de la vie privée des jeunes enseignants), des formations les mercredis après-midi lors des trois semaines de stage (ce qui réduit le temps nécessaire de préparation de classe) et aucune formation de terrain sur les autres cycles que celui dans lequel le PES est affecté. Cette formation est également morcelée puisque les deux membres du binôme se voient imposer des options différentes (Par exemple, sciences pour l’un et histoire-géo pour l’autre)… À charge pour chacun de transmettre ce qu’il a appris à son collègue, d’autant plus qu’il est demandé aux collègues d’enseigner toutes les disciplines durant leur trois semaines de terrain !
ET APRES ?
Après cette année de formation, finalement incomplète, les PES sont titularisés le 1e septembre suivant, sous réserve d’obtention du Master pour certains et de la validation par l’inspecteur de circonscription (en fonction des avis émis par le PEMF et le tuteur ESPE). Vient alors le moment du mouvement et de la première affectation. Pour la majorité des futurs T1, la première affectation est provisoire et obtenue seulement au terme du troisième mouvement, fin août ou parfois après la rentrée de septembre. Ainsi s’enchaînent plusieurs années d’affectations provisoires, de remplacements, de postes fractionnés, qui demandent à ces jeunes enseignants une grande adaptabilité, réactivité, disponibilité alors même qu’ils sont peu expérimentés. Le jeune enseignant est très sollicité. Alors qu’il a besoin d’un temps de préparation conséquent, il est invité à un certain nombre d’animations pédagogiques spécifiques aux T1, T2… oscillant entre le « vivement conseillé » et « l’obligatoire » (bien sûr, en dehors du temps de classe), est convoqué aux réunions, concertations et conseils de l’école et aux réunions, formations, concertations REP + le cas échéant…
Il est bien évident que malgré les discours du gouvernement, la formation des professeurs des écoles reste insatisfaisante. Le cumul de l’année de stage et la validation du master met une pression considérable sur des jeunes collègues à qui on confie une classe en responsabilité ainsi qu’une formation que d’autres étudiants suivent à temps plein. L’impact de toutes les réunions et formations sur la vie privée n’est pas non plus acceptable. Toutes ces difficultés mettent les collègues en souffrance et ont provoquées en 2015-2016 des démissions de PES mais également de T1 !
La CGT Éduc’action revendique le recrutement des professeurs des écoles au niveau Licence III, suivi d’une formation d’enseignant pleine de deux années, donnant doit au grade Master. Les stagiaires ne doivent pas être considérés comme des moyens d’enseignement mais comme des personnels en formation. De plus, cette formation, y compris durant les premières années d’exercice, doit être comptabilisée dans les temps de service et se dérouler sur le temps de classe et non s’ajouter au travail quotidien, plus lourd en début de carrière.