Encore une rentrée catastrophique !
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Nous souhaitons commencer notre déclaration par la question importante de la « revalorisation salariale » et de l’évaluation des personnels enseignants. La question du protocole de revalorisation préoccupe de nombreux personnels qui ont constaté une perte de pouvoir d’achat hors tabac de 14,27% depuis 2000. Ce que le Ministère présente comme une avancée est largement inférieur à ce qui a été perdu. En faisant des simulations tenant compte du fait que la part fixe de la prime ISOE est intégrée au salaire, ce qui est évidemment une bonne chose, en moyenne, sur l’ensemble des personnels enseignants, ce serait une augmentation de 5,21%, ce qui est très insuffisant. Et l’acceptation du PPCR entraîne de fait un gel des salaires jusqu’en 2020. Nous sommes opposés à la création de la classe exceptionnelle qui n’est réservée qu’à 10% des personnels et qui ne fera qu’accroître les inégalités, et nous dénonçons la nouvelle procédure d’évaluation des enseignants qui va venir renforcer les avancements de carrière au mérite, et les moyens de pression de la hiérarchie sur les personnels enseignants avec l’instauration d’entretiens individuels où l’enseignant n’est pas sur un pied d’égalité avec le chef d’établissement. La CGT éduc’action revendique une augmentation immédiate pour tous les personnels de 500 €, une déconnexion totale entre la rémunération et l’évaluation et une grille à un seul grade avec un avancement uniforme.
La question des lycées en éducation prioritaire nous interpelle également. La 1° réponse de Mme Vallaud-Belkacem aux personnels des lycées de l’éducation prioritaire qui étaient en grève le 17 novembre, et qui le seront encore le 29 confirme ce que nous avions déjà dénoncé. La liste des lycées en éducation prioritaire n’a jamais été présentée parce que tous les lycées sortent de l’éducation prioritaire. En recevant les personnels des lycées en grève et en daignant leur accorder l’intégralité de l’indemnité ZEP en 2018‐2019, au lieu d’un versement prévu aux 2/3, Mme la Ministre a rendu officielle la sortie des lycées de l’éducation prioritaire. Nous nous opposons à cette décision. Les difficultés sociales ne s’arrêtent pas en seconde. Nous rappelons notre refus de toutes sorties d’écoles, de collèges, de lycées de l’éducation prioritaire, et notre demande de réintégration de ceux qui en sont sortis en 2015 et de nouvelles entrées en fonction des besoins réels. Nous attendons de voir la confirmation et les contours de l’annonce de la création de 450 postes pour les lycées défavorisés avant de voir s’il s’agit d’un vrai changement de politique.
Concernant plus précisément le bilan de la rentrée scolaire 2016 dans notre académie, nous ne pouvons dans cette déclaration aborder l’ensemble de nos sujets de préoccupation. Quelques- uns ont retenu un peu plus notre attention.
La mise en place de la réforme du collège, alors même que les moyens budgétaires alloués aux collèges de l’académie devait permettre « d’accompagner tout particulièrement la mise en œuvre de la réforme du collège » (documents préparatoires au CTA du 20 janvier 2016, p 19), est une catastrophe. Nous dénonçons la nocivité de la réforme dont nous demandons toujours l’abrogation et nous constatons les conséquences négatives directes sur le terrain : des élèves dont le temps de cours est inférieur à l’horaire réglementaire, un temps de présence des enfants dans l’établissement accru, une amplitude horaire de présence des enseignants sur le lieu de travail bien plus importante, des emplois du temps annualisés, des conflits avec les chefs d’établissement, des enseignements différents selon les collèges, et des classes toujours aussi chargées !
Nous nous indignons également de la fermeture programmée d’au moins quatre collèges dans l’académie (Pablo Néruda, Jacques Daviel et Pierre Mendès-France dans l’Eure, et Guy Môquet en Seine-Maritime). Trois de ces collèges sont en éducation prioritaire et nous ne pouvons croire qu’il s’agit d’un hasard. Nous estimons que de petits collèges sont bien plus propices à des conditions d’enseignement sereines que de grands ensembles. Et nous voyons dans la fermeture programmée de trois collèges REP +, un danger de créer des collèges « explosifs ». Nous pensons que le rectorat doit peser de tout votre poids pour empêcher la fermeture de ces 4 collèges. Nous appelons également, dans un cadre intersyndical, les personnels et les parents à manifester le 10 décembre à Evreux contre la fermeture des trois collèges de l’Eure.
Nous sommes aussi très inquiets des moyens insuffisants en postes d’Assistants d’éducation. La situation est toujours particulièrement préoccupante dans de nombreux secteurs et notamment au lycée des Bruyères à Rouen, où il n’y a que 8,5 postes d’assistants d’éducation pour 1228 élèves plus les post-bacs, dont deux pour l’internat. La surveillance de l’établissement est donc le plus souvent assurée par 2 Assistants d’éducation seulement, et mercredi 23 novembre il n’y en avait qu’un. Les couloirs ne sont plus surveillés et il y a déjà eu au moins un cas d’agression d’enseignant. Nous demandons à ce que le rectorat prenne la mesure de la situation et accède aux revendications des personnels.
Concernant les lycées professionnels, à la suite d’un article du Canard enchaîné daté du 21 septembre 2016, titré « le tableau noir de l’enseignement professionnel », la CGT s’insurge contre la baisse de 3340 postes ETP dans l’enseignement professionnel depuis 2012. Pourtant, telle le mauvais élève se vantant devant ses camarades de classe d’obtenir de bons résultats, la ministre osait déclarer : « je suis particulièrement engagée en matière d’enseignement professionnel ». Elle était tellement engagée qu’on se souvient qu’en 2015, les 4000 postes prévus pour les LP ont été finalement affectés… à la réforme du collège (une autre grande réussite pour déréguler l’enseignement tout en prétextant lutter contre les inégalités scolaires). Pourtant, il y a urgence à financer une filière qui compte en son sein une forte proportion des élèves décrocheurs de ce pays. Le gouvernement, en parfait accord avec la droite sur ce sujet comme tant d’autres, préfère livrer petit à petit la formation professionnelle au patronat, à travers les aides accordées tous azimuts au développement de l’apprentissage, rompant ainsi avec le principe d’un enseignement public et laïc de l’enseignement professionnel, la notion de laïcité s’entendant au sens de l’indépendance des services publics à l’égard des groupes d’intérêt économiques privés.
Enfin, nous ne pouvons terminer cette déclaration sans alerter à nouveau sur la dégradation continue du climat de travail dans de nombreuses écoles et établissements. Prenant de face les conséquences sociales sur leurs élèves et leurs familles d’une crise économique amorcée dans les années 70, et subissant de plus en plus souvent les pressions d’une hiérarchie formée aux nouvelles méthodes de management, les personnels souffrent dans leur tête et dans leur chair de la dégradation de leurs conditions de travail. Nous le mesurons par exemple au lycée Val de Seine, où un enseignant a tenté de mettre fin à ses jours le 31 août dernier à cause de relations fortement dégradées avec la hiérarchie. Le rectorat avait pourtant été informé dès 2014 des tensions qui existaient dans cet établissement grâce à un compte-rendu de visite du CHSCTD qui pointait par exemple que, je cite : « les relations sont tendues entre le personnel de l’Education Nationale et l’équipe de direction dues notamment à des problèmes de communication. L’administration semble exprimer peu d’empathie envers les difficultés rencontrées par les personnels qu’elle encadre. » Malgré la tentative de suicide récente, l’administration continue à faire la sourde oreille, refusant de procéder aux enquêtes réglementaires paritaires (articles 5-7 et 53 du décret modifié n°82-453). Les personnels doivent en tirer toutes les conséquences, pour ne pas perdre leur vie à la gagner.