LE RAPPORT CALVEZ-MARCON ou COMMENT DÉVALORISER L’ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL PUBLIC ET LAÏC
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« La voie professionnelle scolaire : viser l’excellence » : l’intitulé du rapport Calvez-Marcon serait-il ironique ? La question se pose tant le contenu du rapport semble en décalage avec l’objectif affiché. Pour les PLP, il faudrait plutôt traduire par : casse du service public de l’enseignement professionnel.
Remise en cause du service public et laïc de l’enseignement professionnel.
Les branches professionnelles et le patronat, les fameux « partenaires » du monde professionnel, sortiraient gagnants si les préconisations du rapport étaient appliquées : refonte des programmes et des référentiels sous leur contrôle, développement des campus des métiers et des qualifications (y siègent déjà des multinationales, des lobbys et des organisations patronales), création de conseils d’orientation stratégiques au sein de réseaux de lycées, avec présence importante des partenaires économiques. Le rôle des Régions dans l’information à l’orientation serait renforcé.
Remise en cause des diplômes nationaux : diminution des spécialités professionnelles et regroupement par filières en classe de seconde bac pro (on passerait à seulement deux années de spécialisation pour obtenir un bac pro ?!) ; conventions tripartites élèves/familles/lycées pour adapter les modalités et la durée des CAP ; possibilité d’adapter localement les contenus, la durée et les modalités d’une formation ; évaluation par blocs de compétences ; disparition en l’état du diplôme intermédiaire.
Régression pour les élèves des classes populaires : le développement de l’apprentissage favorise avant tout les garçons au détriment des filles, les élèves qui peuvent faire jouer leurs relations pour trouver une entreprise d’accueil, ceux qui maîtrisent les codes comportementaux, mais aussi ceux qui ont la bonne couleur de peau ! L’instauration de modules différenciés en Terminale bac pro (l’un pour la poursuite en post-bac, l’autre organisé autour de la recherche d’emploi) équivaut à une forme de tri social.
Promotion du modèle entrepreneurial et de l’esprit d’entreprise : objectif affiché « d’apprendre à entreprendre », développement des mini-entreprises, renforcement des liens école-entreprise, stages obligatoires en entreprise pour les enseignants, oral en classe de 3ème à l’issue du stage obligatoire avec un jury comportant « des représentants du monde économique ». De plus, la refonte des programmes des enseignements généraux se ferait dans le sens d’une vision utilitariste de l’enseignement, en reléguant au second plan les finalités culturelles et civiques.
Promotion du modèle managérial et gestionnaire : évaluation de l’efficacité des formations, « démarche qualité », systématisation de la démarche de projet, développement des projets professionnels personnalisés, profilage des postes de chefs d’établissements.
Promotion de l’apprentissage et de la mixité des parcours et des publics : il s’agit avant tout d’un choix idéologique visant à casser le service public, à inculquer les valeurs entrepreneuriales et à renforcer la mainmise du patronat sur la formation professionnelle. Présenter cette voie comme celle de l’excellence en dit long sur les reculs sociaux et idéologiques que subit notre société. La mixité des parcours et des publics, couplée avec le suivi personnalisé des élèves, alourdirait à coup sûr le travail des PLP et menacerait leur statut.
Pour la voie professionnelle, la CGT éduc’action de l’académie de Rouen revendique :
- Un véritable service public et laïc de la voie professionnelle : des programmes, des diplômes, des horaires hebdomadaires définis nationalement et égalitaires pour les élèves et les personnels. La laïcité doit s’appliquer, au sens de la séparation de l’État et des « partenaires économiques ».
- De bonnes conditions d’enseignement et de travail avec des maximas de 20 élèves par classe (15 en éducation prioritaire), de très nombreux dédoublements et le respect de la liberté pédagogique.
- Un statut PLP maintenu et renforcé : non à l’annualisation du temps de service.
- Un lycée professionnel qui émancipe : culture technique et culture générale doivent permettre à nos jeunes de bien s’insérer professionnellement et d’exercer pleinement leur citoyenneté.