Victoire des grévistes au CH du Rouvray.
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Vendredi 8 juin, vers 14h45 les grévistes réunis en AG avec l’intersyndicale et les grévistes de la faim sont sortis en criant victoire. Ils venaient de voter à l’unanimité pour signer le protocole de fin de grève : 30 créations de postes ont été arrachées, ainsi qu’une unité pour adolescents et une UHSA (unité pour les détenus) et la mise en stage des personnels en CDD. Les premiers mots des personnels ont été pour les grévistes de la faim. Chacun de leur nom a été appelé et applaudi. Ils ont brandi leur petite bouteille de nutriments protéinés. Puis un agent gréviste a rendu hommage à tous les secteurs en lutte qui les ont soutenus et en premier les cheminots : « Tous ensemble, on a passé un sacré message avec les autres secteurs en lutte », « On n’oublie pas que d’autres secteurs sont toujours en lutte », « Hôpitaux, cheminots même combat ! », « On va mettre tout de suite une banderole de soutien aux cheminots à l’entrée de l’HP ». Une femme de gréviste de la faim déclare, à l’annonce de la grève de l’hôpital Janet au Havre, qu’elle sera à la manif au Havre mardi 12.
Un mouvement de lutte inédit au Centre Hospitalier du Rouvray.
Les agents de l’hôpital étaient en grève depuis le 22 mars pour dénoncer la sur-occupation chronique de l’hôpital, le manque de personnels, les conditions de travail dégradées et les conditions d’accueil déplorables des patients. Ils revendiquaient la création immédiate de 52 postes pour améliorer leur accueil et leur prise en charge. Un audit (indépendant et coûteux) effectué l’année dernière conseillait quant à lui la création de 56 postes …
Devant l’absence de réponses de la direction de l’hôpital et de l’Agence Régionale de Santé, 5 agents s’étaient mis en grève de la faim le 22 mai ; puis deux autres les avaient rejoints. Depuis, trois d’entre eux s’étaient vu contraints d’arrêter leur grève de la faim. Ils étaient soutenus par une intersyndicale solide (CGT, CFTC, CFDT, SUD) et le Comité de grève des salariés du CH du Rouvray. Ils se réunissaient en Assemblée Générale tous les jours à 14h.
Un comité de soutien s’était rapidement constitué et des syndicats d’autres secteurs professionnels (dont le nôtre, dans la mesure de ses moyens) participaient à la popularisation du mouvement et aux actions votées en AG. Tous les jours à 18h, une AG ouverte aux soutiens était organisée devant le bâtiment de l’administration de l’hôpital qui avait été occupée pendant deux jours. Quant à la direction, elle avait déserté les lieux.
Les médias locaux avaient rapidement rendu compte de la grève. En revanche, il a fallu attendre presque 2 semaines de grève de la faim pour enfin briser le mur du silence médiatique au niveau national.
La mobilisation sort de l’hôpital.
Lundi 4 juin, une marche était organisée à Rouen : un cortège d’environ 1 000 personnes, très dynamique, avec des hospitaliers issus de plusieurs établissements de l’agglomération de Rouen et du Havre, des associations d’usagers, des soutiens interprofessionnels (cheminots, éducation, Renault) et des organisations politiques.
Jeudi 7 juin, 440 personnes sont parties à 6h45 de la gare de Sotteville pour bloquer le boulevard industriel à la CARSAT puis le pont Mathilde. Gigantesque bordel à Rouen. Il y avait beaucoup de cheminots et d’hospitaliers du Rouvray, des syndicalistes (de Renault Cléon ou nous, entre autres) et de nombreuses personnes du comité de soutien. Puis le cortège est allé à l’Agence Régionale de Santé.
Négociations les 7 et 8 juin.
La Directrice de l’ARS, Mme Gardel a d’abord proposé un rendez-vous à la préfecture, puis au Centre Hospitalier du Rouvray, à condition qu’il n’y ait aucune violence à son égard. Elle y a été accueillie dans un silence glacial. Les négociations ont abouti au résultat que vous connaissez.
Une lutte unitaire contre l’austérité qui maltraite et qui tue.
Il aura fallu deux mois et demi de grève pour que ceux qui parlent de « progrès médicaux », d’« innovations dans les organisations de soins », et d’ « améliorations de la qualité » se décident enfin à parler aux grévistes.
Ils (le ministère de la Santé et l’ARS) mettent l’hôpital en danger - et nous avec. Au Rouvray, des salariés ont mis leur santé en jeu pour se faire entendre. Ailleurs en France, des personnels hospitaliers, écoeurés et épuisés, se sont donné la mort. Faute de personnels suffisant, des patients sont mal soignés ou meurent sur un brancard. L’austérité tue. Et pourtant, le gouvernement prévoit la suppression de 32 000 lits supplémentaires.
Il y a sans doute un exemple à suivre dans cette grève au CH du Rouvray : elle a été unitaire, soutenue par les syndicats et un comité de grève, des actions déterminées ont été menées avec des soutiens interprofessionnels (dont beaucoup de cheminots). C’est cette convergence qu’il faut chercher à généraliser pour mettre enfin un coup d’arrêt au dynamitage de nos services publics. Comme l’a dit un des grévistes après l’annonce de la fin de la grève : « Il faut se souvenir de tout ça car il faudra recommencer ».