2ÈME CHSCT EXTRAORDINAIRE LUBRIZOL : AYEZ CONFIANCE, CON-FIAN-CE !
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Cette deuxième séance extraordinaire du CHSCT, après celle du 30 septembre 2019 (voir compte-rendu sur notre site, rubrique Nos carrières/santé au travail), fut présidée à nouveau par le DASEN. Du moins, avant qu’il ne nous quitte et saisisse l’occasion pour ne pas répondre aux questions sur le droit d’alerte auquel il a refusé de donner suite…
Dans leur déclaration préalable, il est amusant de constater que l’inénarrable représentant UNSA se réapproprie la belle citation de Rostand : « l’obligation de subir nous donne le droit de savoir », citée la veille au soir dans le reportage d’Envoyé spécial par Annie Thébaud-Mony, experte de la santé au travail. Alors que l’UNSA refuse systématiquement de voter des enquêtes du CHSCT, fidèle à son rôle d’allié de l’Administration.
Nous reviendrons dans ce compte-rendu sur les points essentiels de cette séance, à bien des égards exaspérante, mais surtout inquiétante pour la santé de milliers de collègues qui ont le droit de savoir, après avoir subi. Avant de subir encore...
Le DASEN et le parapluie préfectoral
L’IA-DASEN, également président du CHSCT départemental, Olivier Wambecke, a martelé tout au long de la séance que tout se déroule sous l’autorité du préfet. Un représentant de la DSDEN était présent chaque jour au COD (Centre Opérationnel Départemental) de la préfecture.
Le préfet avait pris un arrêté de fermeture pour 13 communes le 26 septembre mais des maires ayant ensuite pris l’initiative de fermer les établissements scolaires, la situation s’en est trouvée compliquée pour la DSDEN, laquelle a suivi les décisions municipales, par souci de cohérence. Complexité renforcée par les décisions de chefs d’établissements d’EPLE. Pour le 27 septembre, le préfet a laissé aux communes toute latitude pour fermer. Les décisions du DASEN ne furent pas difficiles à prendre de son point de vue : il n’y a pas d’autre stratégie possible que celle du préfet pour l’Education Nationale, celle-ci étant un maillon de la chaîne de l’État. C’est pas moi, c’est le préfet !
Il a en outre mis en garde contre certaines informations, qualifiant par exemple de « conneries » (sic) celles d’ATMO Normandie sur les dioxines dans la commune de Préaux. Sur les risques réels liés aux HAP (Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques), à l’amiante, au benzène, etc., la réponse est toujours : les analyses communiquées par les autorités sont « rassurantes ». Classique. Insupportable.
Le DASEN peu à l’aise sur le droit de retrait
Interpellé par les syndicats sur le droit de retrait, le DASEN semble peu au fait de la réglementation : si vraiment il y a danger, moi, je partirais en courant, a-t-il dit…
Ensuite, le DASEN et le Rectorat ont cherché à nous enfumer en disant qu’il existe d’importantes limites à l’exercice de ce droit. Que cela n’impressionne pas les collègues : nous leur recommandons la lecture de l’article 5-6 du décret 82-453 ainsi que le guide juridique d’application de ce décret : ils verront par eux-mêmes que dans la situation présente, les retraits étaient parfaitement justifiés.
D’ailleurs, en difficulté sur cette question, le DASEN a pris l’engagement de ne procéder à aucune retenue salariale. Il a même indiqué, poussé en cela par la CGT, de réexaminer la situation de la grève au collège Jean Lecanuet car celle-ci a été déclenchée à cause du refus par la hiérarchie de reconnaître le droit de retrait. Le DASEN le dit : « bienveillance » ! Dont acte.
Gestion problématique du 26 septembre par la DSDEN
Les organisations syndicales ont pointé la très grande confusion qui a régné au sujet des fermetures d’établissements le 26 septembre : à Déville-les-Rouen, exemple rapporté par la FSU, des écoles sont restées ouvertes alors que des établissements du secondaire étaient fermés, ce qu’ignorait le DASEN visiblement.
Autre dysfonctionnement, l’ordre donné le matin du 26 par certains IEN de se rendre sur leur lieu de travail et d’y rester malgré l’incendie en cours.
Le DASEN a cependant fait son mea culpa sur les sms reçus par les directeurs d’école le 26 septembre, vers 9 heures seulement, alors que l’incendie s’est déclaré vers 2h40. Il tente ensuite de se justifier en listant tout ce que ces services ont effectué pendant l’accident, et en énumérant tous les sms envoyés au cours de la journée. Donnant l’impression d’avoir été débordé (« on dort 3 ou 4 heures par nuit »), il tient à faire une mise au point pour contester cela, bien que le ministère n’ait donné aucun moyen supplémentaire à la DSDEN pour affronter une catastrophe à laquelle elle était très mal préparée, de toute évidence.
Aucune garantie sur le nettoyage des établissements scolaires
Cette question cruciale n’a été que peu abordée car le temps de la séance était limité par la DSDEN. Mais malgré les affirmations qui se veulent rassurantes, la réalité est tout à fait différente (nettoyage sans équipements de protection, au kärcher, parfois en présence d’enfants dans les locaux…), et pour la CGT, il aurait fallu faire appel à des entreprises spécialisées, en dépit du coût et du temps que cela prendrait : la santé doit être la priorité des priorités.
Accidents du travail et médecine de prévention : une institution défaillante
Pour la CGT, une fois l’accident intervenu, l’administration a l’obligation de prendre en charge les collègues sur le plan médical. Ce qui n’est pas le cas et nous met en colère. La DSDEN a ainsi été incapable de recenser et de communiquer au CHSCT les déclarations d’accident du travail effectuées depuis le 26 septembre ; incapable de reconnaître qu’il y a potentiellement des centaines d’accidents du travail (on dit accident de service dans la fonction publique) car tous les personnels ayant eu des symptômes sur leur lieu de travail ou pendant le trajet vers celui-ci doivent être pris en charge en accident du travail ; incapable d’admettre que l’employeur a l’obligation de remplir une déclaration d’accident du travail dans ces situations ; incapable d’informer les personnels impactés sur ces procédures et de l’existence de la médecine de prévention du Rectorat ; incapable de donner les moyens à ce service de fonctionner puisqu’il n’y a plus que 1,4 poste de médecin pour environ 35000 personnels dans l’académie, et que le docteur Lecoq, présente à cette séance, a indiqué qu’il faudrait veiller à ne pas saturer ses services ! Franchement, nos collègues ont de quoi être révoltés par la prise en charge de leur employeur.
Droit d’alerte pour danger grave et imminent : que penser d’une administration qui une fois de plus, ne respecte par le droit ?
Aucune réponse, aucune information, aucune suite surtout n’avaient été données par le DASEN au droit d’alerte effectué par la CGT, FO et la FSU le 30 septembre, au moment où se déroulait la séance. A ce stade, il n’y a toujours pas d’enquête du CHSCT, malgré ce que stipule la réglementation, à savoir enquête immédiate (article 5-7 du décret 82-453). Le DASEN a botté en touche et en profité pour quitter la séance, laissant la secrétaire générale répondre laconiquement que les membres recevraient un courrier prochainement. Et il faudrait qu’on fasse confiance !
Vote d’une expertise par un cabinet spécialisé
La CGT pense que le CHSCT doit utiliser les prérogatives qui sont prévues par la loi : sinon, à quoi bon se déplacer si c’est pour seulement écouter les discours lénifiants de l’Administration ? Or, ces prérogatives sont vraiment intéressantes pour la santé des personnels, comme celle consistant à procéder à une expertise indépendante sur Lubrizol par un cabinet spécialisé, en l’occurrence Aptéis.
La délibération soumise au vote par la CGT a donc été adoptée grâce aux voix de la FSU et de FO, et ce malgré le vote contre de l’UNSA, à qui ses adhérents feraient bien de demander des comptes. A lire, le texte en PJ.
Bref, l’Administration est en difficulté et pour notre part, il ne peut être question de faire confiance dans ces conditions. La CGT appelle à amplifier la mobilisation des travailleurs et des citoyens pour exiger la vérité, pour obliger les autorités à prendre des mesures rigoureuses afin de protéger les personnels et les usagers, notamment pour une prise en charge stricte sur le plan médical. Pour ne pas perdre sa vie à la gagner !