CHSCT : exigeons que la santé au travail devienne vraiment une priorité
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Déclaration au CHSCT départemental 76 du 1er octobre 2020
Bien qu’il s’agisse du premier CHSCT ordinaire depuis bien longtemps et bien que l’ordre du jour ne prévoie pas de discussion sur l’épidémie de Covid-19, nos conditions de travail restent tellement et profondément marquées par le virus qu’il nous faut à nouveau insister encore et toujours sur les inacceptables carences de l’employeur en la matière, d’autant que l’évolution observée ces dernières semaines ne manque pas d’inquiéter fortement, particulièrement en Seine-Maritime.
La question des masques n’est ainsi toujours pas réglée. Certes, la CGT Educ’action approuve totalement le port obligatoire du masque sur le lieu de travail, mais l’employeur refuse toujours d’équiper ses agents de masques protecteurs et aux normes. Avec constance depuis le début de l’épidémie, la CGT continue d’exiger de vrais masques gratuits et aux normes (FFP2 et chirurgicaux de norme EN14683) pour l’ensemble des personnels, avant tout pour les personnels des écoles au contact d’enfants qui ne peuvent porter de masques mais également pour tous les personnels.
Par ailleurs, le fait que tous les personnels et élèves du secondaire portent un masque ne doit pas pour autant dispenser le gouvernement de ses autres obligations sanitaires, qu’il s’agisse de la création de postes afin de réduire les effectifs par classe ou désinfecter régulièrement les locaux, mais aussi de règles sanitaires nationales et suffisamment rigoureuses pour garantir l’hygiène des mains, la distanciation physique, l’aération ou encore la désinfection. Disons-le clairement, les écoles et les établissements scolaires ne constituent pas à ce jour des lieux suffisamment sains et sécurisés, comme le rappelle Santé publique France. Le ministère ne saurait se soustraire à ce que lui impose la réglementation : fournir des lieux de travail sains et sécurisés (directive européenne du 12 juin 1989) et éviter les risques, les évaluer et les combattre à la source (article L4121-2 du Code du travail).
L’ordre du jour de ce CHSCT ordinaire porte essentiellement sur l’analyse de bilans (santé, médecine de prévention, DUER...) mais qui, hélas ! ne rompt toujours pas avec l’ordinaire d’une institution nullement exemplaire en matière de prévention et de protection de la santé de ses agents. Nous allons devoir redire à nouveau que les documents envoyés ne peuvent atteindre l’objectif assigné par les articles 61 et 63 du décret 82-453 relatif à l’hygiène et à la sécurité au travail : dresser un bilan le plus exhaustif possible de l’état de santé des travailleur·se·s de l’Education et de leurs conditions de travail, bilan assorti d’un programme de prévention des risques professionnels. La douzaine de pages du document reçu en amont de cette séance est bien trop incomplète. Ainsi, comme nous l’avions déjà pointé les années précédentes, le bilan réalisé ne correspond pas aux préconisations telles qu’elles sont explicitées dans le guide juridique d’application du décret 82-453. Il manque ainsi, entre autres : un bilan précis et analysé des accidents du travail et des maladies professionnelles ; les chiffres des dépenses en matière de sécurité et d’amélioration des conditions de travail ; un état des lieux des conditions physiques de travail (agents exposés au bruit, aux produits chimiques...) ; un état des lieux des dangers graves et imminents ; les rapports des organismes techniques ; une analyse des modifications importantes intervenues et qui ont eu un impact sur les conditions de travail (par exemple, le télé-travail consécutif à l’épidémie), etc. D’autres éléments manquent comme un bilan de l’accident de l’usine Lubrizol et la présentation de mesures de prévention des risques chimiques.
Nous attirons également l’attention des membres de l’instance sur le risque lié à l’amiante puisque nous lisons avec inquiétude que seuls 80% des lycées du département, 73% des collèges et surtout 23% des écoles ont un DTA (dossier technique amiante) présent ! Nous réclamons des mesures urgentes pour prendre à bras le corps les risques liés à l’amiante dans l’Education Nationale, risques largement sous-évalués, voire occultés selon les investigations menées par le quotidien Libération. Et ce n’est pas la confirmation de la suppression de l’ONS (Organisme National de la Sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement) qui va arranger la situation.
Bref, les bilans présentés ne sont absolument pas à la hauteur de l’enjeu, à savoir la protection de la SANTE au travail de plus de 20 000 agents du département. Ce n’est pas rien ! Nous sommes en droit d’attendre de la part d’une institution si importante qu’elle soit, sur ce point, si ce n’est exemplaire, du moins qu’elle se conforme à la loi, donc au décret 82-453 et au Code du travail. Si l’on veut éviter un nouvel accident industriel du type Lubrizol, une nouvelle épidémie potentiellement pire que la Covid-19, si on veut prévenir les risques psychosociaux liés aux conditions de travail pénibles pour tous les personnels et notamment les directeurs et les directrices afin qu’il n’y ait plus d’autres suicides en lien avec le travail comme celui de Christine Renon, et si l’on veut également anticiper l’impact du dérèglement climatique sur notre santé, l’Education Nationale doit, pour protéger la santé de ses agents, faire son aggiornamento et impulser une tout autre politique visant à :
- Augmenter les budgets en faveur de la santé au travail : recrutement de médecins de prévention ; équipement des écoles et des établissements scolaires (points d’eau, sanitaires...) ; formation d’assistants de prévention et temps de décharge à mi-temps ou à plein temps, par exemple. Nul progrès n’est envisageable en l’absence de moyens budgétaires et humains supplémentaires ;
- Développer et renforcer les prérogatives des instances représentatives dans le domaine de la sécurité et de la santé (CHSCT, CHS d’établissements, conseils d’école...) ;
- Construire une vraie culture de la prévention des risques professionnels en développant la formation initiale et continue aux risques professionnels à destination de tous les personnels ;
- Eduquer dès le plus jeune âge les enfants et les adolescents à l’hygiène, à la santé, au soin de soi et des autres.
Pour ne pas perdre sa vie à la gagner !