Education : rien n’a été fait pour une rentrée sereine !
par
popularité : 14%

Madame la Rectrice,
Le confinement en mars et avril était une conséquence directe de la politique menée depuis très longtemps et qu’Emmanuel Macron a amplifiée en arrivant au pouvoir. Entre 2017 et 2018, 4172 lits d’hôpitaux ont disparu (17 500 en six ans). Malgré les mobilisations massives des personnels hospitaliers et de santé, le gouvernement Macron-Philippe a continué la politique de casse de la santé, ne laissant plus d’autre choix que le confinement aux conséquences sociales majeures. L’après confinement a un air de déjà vu, avec une montée de l’épidémie, certes à un rythme peut être plus lent qu’en février et mars, face à très peu de possibilité de lutter contre la circulation du virus : pas de personnels et de moyens pour les laboratoires, aucune distribution de masques à grande échelle.
Nous n’y voyons pas « l’incompétence » d’un gouvernement débordé, mais bien une politique assumée et que nous dénonçons, de défendre, en pleine crise sociale et sanitaire, les profits énormes des entreprises et des actionnaires, au détriment des services publics déjà insuffisamment pourvus pour combler les inégalités sociales et scolaires. Les aides du plan de relance de l’économie vont se monter à 100 milliards, et seront distribuées sans aucune contrainte à l’emploi et n laissant dans le même temps des entreprises comme Nokia ou Bridgestone profiter pourtant de la crise sanitaire et de son impact auprès des salarié.e.s pour imposer dès maintenant des plans sociaux.
Dans l’Education, le refus ministériel et gouvernemental de préparer la rentrée scolaire 2020-2021 en ayant tiré les leçons de la crise sanitaire, dont l’objectif ambitieux aurait dû être d’assurer à l’ensemble des élèves et des personnels de réelles garanties sanitaires ainsi que des conditions de travail à même de pallier les inégalités et retards dus à plusieurs mois d’interruption scolaire est évident. Le bilan de la rentrée 2020 est encore pire que le bilan de la rentrée 2019. Dans le premier degré, la promesse déjà insuffisante de 1248 créations de postes supplémentaires d’avril n’a pas été tenue avec seulement 625 postes créés aux concours internes et aux seconds concours internes et les effectifs de classe restent encore trop lourds pour favoriser la réussite de tous. La situation dans le second degré est catastrophique, avec de nombreuses suppressions de postes qui ont pour conséquences l’augmentation des effectifs de classe qui atteignent voire dépassent de plus en plus souvent les maxima déjà trop élevés décrétés par vos propres services. Nous tenons aussi à rappeler notre soutien à l’ensemble des établissements, comme le collège Branly au Grand Quevilly, qui sont en lutte pour des ouvertures de classes. Les conditions de travail des personnels administratifs se dégradent encore. La précarité est toujours bien présente pour bon nombre de personnels de l’Education Nationale, et les AESH subissent à la fois cette précarité mais aussi l’instauration des PIAL et la mutualisation idoine qui détériorent encore leur situation.
Et pourtant, les enjeux de cette rentrée sont nombreux : éviter une diffusion de l’épidémie dans les lieux scolaires et une propagation dans la population avec des mesures sanitaires efficaces ; garantir la scolarité de tous les élèves, toute l’année, dans des conditions permettant le rattrapage du retard scolaire et des inégalités qui se sont creusées ; garantir la sécurité des personnels vis à vis de la COVID 19 ; mettre fin à la précarité parmi les salarié-e-s de l’Education Nationale alors même que les difficultés sociales s’accroissent dans la population. Mais pour viser cet objectif il fallait y mettre les moyens, ce qui n’a jamais été fait alors même que d’autres pays, comme l’Italie, ont investi 7 milliards pour favoriser l’Education au moment du déconfinement. Nous revendiquons au plus vite des dépistages réguliers des personnels et des élèves avec du personnel pour analyser rapidement les prélèvements, des masques chirurgicaux – voire FFP2 – et des produits de protection en stock important, le renforcement des moyens et des prérogatives des CHSCT, une médecine de prévention réellement présente et efficace, la suppression du délai de carence et la protection des personnels fragiles face à la COVID et un recrutement de titulaires, très massif et en urgence, pour l’enseignement, l’entretien, la vie scolaire, les services sociaux et médico-scolaires, recrutement qui passe par la titularisation sans conditions de tous les précaires, AINSI QUE des stagiaires 2019. Nous revendiquons également des maxima de classe à 10 élèves de l’école au lycée, maxima qui pourront repasser à 15 élèves par classe, et moins en REP et REP+ si la situation s’améliore.
En refusant cette politique ambitieuse, le gouvernement et M. Blanquer portent une responsabilité dans la reprise évidente de l’épidémie que nous vivons actuellement. Il est toujours difficile d’avoir des chiffres précis concernant la COVID-19 dans les lieux scolaires, et l’absence d’un point COVID pour ce CTA le démontre. Nous ne pouvons que nous raccrocher au chiffre inquiétant de 36% des clusters, dont l’origine se situe en milieux scolaire et étudiant. M. Blanquer minimisait toujours le 7 octobre, le poids de ce chiffre qui mêlerait trop de catégories d’âge, et qui lui donne la possibilité de sous-entendre que tout est la faute des fêtes estudiantines. Pourtant des données « santé publique » du 29 septembre signalaient que parmi les clusters des milieux scolaires et étudiants, 45,7 % relevaient du second degré et 21% du primaire contre 33,3 % dans le supérieur. Ces chiffres ne viennent que confirmer les risques que nous pressentions faute de moyens, pour réduire les effectifs de classe, assurer une désinfection plusieurs fois par jour des bâtiments et distribuer en stock important du matériel de protection efficace (masques chirurgicaux voire FFP2, produit virucide, plexiglas...). Rappelons aussi que 33% des clusters proviennent d’un lieu de travail, et que ce chiffre concerne également les personnels de l’Education Nationale. Et malgré tout, sur nos lieux de travail, le protocole rend souvent impossible la distanciation sociale, les masques fournis ne répondent à aucune norme et nous mettons en doute leur efficacité, les personnels fragiles face à la COVID ne sont plus protégé.e.s.
Les décisions ministérielles montrent plutôt une volonté de s’en prendre au salaire et de précariser un peu plus encore certain.e.s salarié.e.s. La suppression de l’indemnité ZEP dans les lycées professionnels et généraux et technologiques, les collèges et les écoles qui relevaient de l’Education Prioritaire il y a encore peu de temps, alors même qu’il accueillent toujours le même public, est d’une mesquinerie inadmissible. Nous dénonçons également la volonté de profiter du recul du concours de recrutement en fin de Master 2 (M2) pour s’assurer un « bataillon » de contractuel.le.s que seraient les futur.e.s enseignant.e.s rémunéré.e.s à 665 E net par mois au lieu de 1450 E.
Enfin, concernant le discours sur la défense de la laïcité d’Emmanuel Macron, nous nous étonnons de l’annonce rendant l’instruction obligatoire dès 3 ans à l’école dans ce cadre, et sans annonce d’aucun moyens supplémentaires. N’oublions pas que si tous les enfants ne vont pas à l’école dès 3 ans, c’est certes le choix de certaines familles (de n’importe quelle religion ou par simples choix idéologiques non religieux), mais c’est aussi lié à des problèmes de scolarisation générés par l’Institution elle-même (manque de places, problèmes d’organisation, manque récurrent d’enseignant·es, d’AESH, harcèlement, phobie scolaire…). Nous constatons aussi que pour le président de la République, les « séparatismes » visés et la question de la laïcité ne concernent que la seule religion musulmane. Une nouvelle fois, nous dénonçons cette stigmatisation de la part du pouvoir en place qui ne remet en cause à aucun moment et d’aucune façon les autres religions. En effet, nous aurions aimé entendre le président Macron s’exprimer également sur le respect de la laïcité dans toutes les écoles privées (et de toute obédience) ou sur leur financement. On ne peut prétendre non plus défendre la laïcité alors que l’on développe parallèlement le financement des écoles privées via la loi Blanquer. À ce titre, nous rappelons notre revendication de nationalisation de l’enseignement privé.