Déclaration CGT au CHSCT extraordinaire Covid du 25 mars 2021
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Commençons d’abord par acter positivement la convocation d’un CHSCT extraordinaire spécial Covid, très peu de temps après les annonces du Premier ministre, jeudi 18 mars. C’est nécessaire dans le contexte sanitaire actuel, c’est conforme aux missions d’un CHSCT et cela marque une différence avec ce qu’il s’est passé au cours de la deuxième vague épidémique, l’instance n’ayant pas été réunie entre début novembre et mi-janvier.
Pour autant, réunir le CHSCT, c’est bien, mais tout reste à faire car la seule chose qui importe vraiment est que cette instance serve concrètement à protéger la santé de nos collègues et à leur garantir de bonnes conditions de travail. Charge donc au président du CHSCT de prouver aux représentant⸱e·s des personnels que la réglementation s’applique partout dans le département et que se dessine enfin une vraie politique de prévention dans ce département.
Las ! Sauf surprise, ce ne sera vraisemblablement toujours pas le cas. Nulle posture idéologique ni opposition de principe de la part de la CGT Éduc’action, comme aimerait le faire croire l’Administration, mais un constat maintes fois effectué. Monsieur le président du CHSCT, prouvez-nous le contraire, nous ne demandons qu’à être démenti⸱e·s ! Et il y a urgence ! Les chiffres alarmants de l’état des contaminations des élèves et des personnels dans les établissements de la Seine Maritime imposent des mesures rapides et efficaces. Sans entrer dans le détail, on constate qu’en juste une semaine, le nombre des élèves positifs au Covid a été multiplié par 10 dans les écoles (19 cas le 11 mars, 164 le 18 !), par 5 dans les collèges et 4 dans les lycées. Du côté des personnels éducation nationale, le nombre des contaminations a été multiplié par 4.
Voyons donc objectivement les faits, sans vaine polémique, mais surtout ce que l’Administration met ou ne met pas en œuvre pour protéger les salarié⸱e·s et commençons, Monsieur le président du CHSCT, par des mesures qui dépendent en partie de vous.
En effet, bien que nous constations jour après jour que l’institution Éducation nationale continue à fonctionner de manière très verticale et autoritaire, chaque DSDEN, chaque chef d’établissement, chaque chef de service est réglementairement tout-à-fait à même de prendre un nombre important de mesures plus locales pour renforcer la prévention et la protection des salariés et des élèves. Ainsi, parmi les mesures de prévention concrètes à mettre immédiatement en œuvre et sans même attendre d’hypothétiques moyens supplémentaires qui manquent de manière structurelle, la DSDEN, responsable du CHSCT dans lequel nous siégeons, devrait par exemple mettre l’accent sur la formation au risque Covid, et plus largement aux risques professionnels. En effet, il n’y a jamais eu de vraie formation aux risques professionnels Covid depuis le début de l’épidémie, sauf ponctuellement en mai et juin 2020. Or les connaissances évoluent et il reste primordial de reprendre ces formations et de les compléter grâce aux avancées de la science. De plus, bien que tous les scientifiques et les responsables de santé insistent sur l’importance des gestes barrières, nous voyons sur le terrain que beaucoup de comportements individuels à risque s’expliquent encore par méconnaissance des modes de contamination, en particulier aéroportée, de certains gestes barrières, de la réalité du danger, etc., et ce, faute de formation et d’éducation à la santé. Or, par son rôle éducatif et son devoir d’exemplarité, l’école peut à l’évidence contribuer à faire reculer l’épidémie en formant correctement et régulièrement les adultes et les élèves de ce département. Pas besoin donc d’attendre les ordres venant du ministre pour agir, Monsieur le président du CHSCT, au moins sur cet aspect de la prévention : il faut un plan de formation aux risques professionnels. Cette formation pourrait également avoir lieu lorsque le protocole évolue. Les chefs d’établissement, les IEN et, pourquoi pas en présence des directrices et des directeurs d’école, pourraient bénéficier d’une formation afin d’avoir une lecture collective des protocoles. Ceci aiderait les personnels à mettre en place les nouvelles mesures dans leurs établissements mais plus encore, ceci pourrait éviter le grand nombre d’interprétations de la Foire aux Questions dans les établissements et les circonscriptions, source de conflit au sein des équipes.
Il en va de même pour réduire la densité de population dans les écoles et établissements scolaires. Dans les lycées, la demie-jauge s’applique maintenant partout, y compris donc dans les lycées privés pratiquant le séparatisme sanitaire et social. Enfin ! Mais nous réclamons la généralisation des dédoublements de classe et/ou demie jauge à tous les autres niveaux, de l’école maternelle au collège. C’est déjà le cas dans des collèges d’autres départements. La réduction de moitié du nombre de personnes présentes dans les écoles et les collèges est donc possible et de nature à freiner l’épidémie. Monsieur le président du CHSCT, mettez en œuvre cette mesure afin d’éviter qu’il y ait encore plus de morts et de malades.
La question des masques, encore et toujours, oppose depuis des mois l’ensemble des syndicats à l’Administration. Le refus, pour des raisons purement budgétaires, de fournir gratuitement des masques aux normes, chirurgicaux et FFP2, aux personnels et aux élèves est insupportable et injustifiable. Nous continuons à l’exiger avec force : monsieur le président du CHSCT, fournissez par exemple des masques FFP2 à tous les agents travaillant dans les écoles maternelles, sans attendre un éventuel ordre venant du ministère.
Bien sûr, d’autres mesures dépendent avant tout de décisions émanant du ministère, du gouvernement... de l’Élysée surtout.
Nous constatons ainsi que l’actualité se concentre ces derniers jours sur la vaccination. C’est une bonne chose et nous sommes convaincu⸱e·s qu’en l’absence d’une stratégie efficace contre la Covid, la vaccination constitue quasiment le seul espoir de sortie de la pandémie. Nous réclamons donc que les salariés de l’Éducation se fassent vacciner massivement le plus rapidement possible, quel que soit le vaccin utilisé et le pays qui l’a mis au point, pourvu qu’il soit efficace, conforme aux protocoles scientifiques internationaux et sans effet secondaire grave. Pour autant, nous sommes conscient⸱e ·s de la pénurie de vaccins au sein de l’Union Européenne et nous refusons également de verser dans le corporatisme. Ainsi, il est discutable de considérer que les enseignant⸱e·s devraient être davantage prioritaires par rapport à d’autres salarié⸱e·s tout autant exposé⸱e·s aux risques voire plus, comme ceux/celles de la grande distribution, de l’agro-alimentaire, de l’énergie, de la sécurité, etc. En outre, rappelons que les débats actuels tendent à occulter l’énorme pénurie de vaccins dans la plupart des pays du monde et les profondes inégalités géopolitiques dans l’accès à la vaccination, au détriment des pays les moins avancés. Donc, mille fois oui à la vaccination mais selon une stratégie favorisant l’égalité de l’accès aux soins pour tou⸱te·s.
L’autre débat qui se fait jour concerne le rôle des écoles dans la transmission du coronavirus. Sans entrer dans un débat scientifique trop technique, il apparaît qu’en l’état actuel des connaissances, l’ouverture des écoles constitue bien un facteur important de propagation de l’épidémie, comme l’expliquait récemment le professeur Arnaud Fontanet. Charge donc à l’Administration de prendre en compte la réalité du risque, de l’évaluer via les documents uniques, d’appliquer la réglementation, soit le Code du travail bien plus que les protocoles sanitaires, et de mettre en place une politique de prévention.
L’évolution du protocole sanitaire pour l’EPS ne manque pas de nous inquiéter. Permettre à nouveau les activités sportives en intérieur, c’est accroître le risque de contamination. On nous réplique que le protocole constitue une garantie suffisante. Cela, c’est de la théorie. La réalité, c’est qu’il est la plupart du temps inapplicable, alors alléger les mesures de protection et de prévention, d’autant plus dans les départements « soumis à des mesures renforcées », ce qui est le cas de la Seine-Maritime, c’est, au-delà de la pure incohérence, risquer davantage de contaminations, surtout avec les nouveaux variants.
Le télé travail est une recommandation forte du gouvernement. Nous pensons que celui-ci doit être cadré juridiquement et négocié avec les catégories de personnels concerné⸱e·s pour qu’il ne dégrade pas les conditions de travail et ne crée pas une souffrance supplémentaire.
Pour le reste, face à ce constat, notre colère de militant⸱e·s en santé au travail et de représentant⸱e ·s des personnels reste vive. Comment, par exemple, ne pas s’alarmer de la situation dans les cantines scolaires où l’insuffisance de la distanciation physique, de la désinfection, du lavage des mains et l’absence d’aération et de protections en plexiglas accroît le nombre de malades dans la société ? L’Éducation nationale et les collectivités locales sont dans l’ensemble coupablement passives face à cette réalité.
Pour la CGT Educ’action, plus d’un an après le début de la pandémie, il faut plus que jamais faire de la santé une priorité, ce que nous ne cessons de défendre au sein de cette instance. La santé comprise dans son acception la plus large, à la fois sociale (physiologique, psychologique, en termes d’inégalités de santé) mais aussi la santé écologique (santé environnementale, inégalités environnementales) à l’image de ce que propose par exemple l’économiste Eloi Laurent à travers le concept de « pleine santé » et des liens étroits entre économie, santé et écologie. A notre niveau, au travail, cela implique d’exiger une tout autre politique de santé et de prévention. La CGT y prendra toute sa part, pour ne pas perdre sa vie à la gagner.