Covid : 14000 décès évitables
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Déclaration CGT éduc’action 76 lue en séance du CHSCT du 24 juin 2021.
Commençons par un chiffre : 14 000. C’est l’estimation du nombre de morts liés au Covid-19 et qui auraient pu être évités si le président de la République n’avait pas refusé de suivre fin janvier les recommandations du conseil scientifique et avait pris dès février 2021 les mêmes mesures qu’il a été contraint de prendre deux mois plus tard, en avril. Dans un article en date du 19 juin et intitulé « Le lourd coût humain d’un confinement tardif », le quotidien Le Monde, sous le contrôle de l’équipe de l’épidémiologiste Pascal Crépey, estime ainsi que 14 600 morts, 112 000 hospitalisations dont 28000 en réanimation,160 000 cas de Covid longs et 1,62 million de cas symptomatiques auraient pu être évités. Chiffres terribles, conséquence d’une gestion sanitaire objectivement coupable et de plus en plus démagogique.
Cette séance du CHSCT a donc lieu dans un contexte ambivalent : d’un côté, l’espoir d’une nette amélioration de la situation épidémique, du moins dans les pays riches, grâce à la vaccination de masse et malgré la progression du variant Delta ; de l’autre, une profonde colère à l’égard d’un Exécutif discrédité par la multiplication des mensonges et la maltraitance infligée au monde du travail.
Concernant l’ordre du jour de cette séance du CHSCT, nous ne détaillerons pas une énième fois, du moins en déclaration préalable, une analyse et des revendications que nous avons pu développer à de multiples reprises dans cette instance en voie de disparition. Malgré les efforts réels entrepris par Madame la secrétaire générale, présidente du CHSCT par délégation en l’absence chronique de M. le DASEN, nous nous heurtons toujours à une institution tout à fait défaillante en matière de prévention des risques professionnels et de protection de la santé des personnels, à cause de l’absence d’évaluation des risques professionnels (DUERP inexistants ou ne servant à rien), de plans de prévention des risques (absence de rapport annuel et de programme annuel de prévention des risques professionnels conformes à l’article 61 du décret 82-453), de services de médecine de prévention réduits à l’impuissance faute de moyens, d’absence de formation aux risques professionnels à tous niveaux et d’absence de moyens humains dédiés à la prévention (aucune décharge pour les assistant.e.s de prévention des écoles, des établissements scolaires et des services).
Nous illustrerons néanmoins notre propos en partant d’un exemple tout à fait révélateur de l’absence de prévention des risques professionnels : le télétravail et le travail sur écrans. La question du travail sur écrans, devenue cruciale avec la pandémie, pose un problème de fond, celui de la méconnaissance du droit du travail et par conséquent de son application. Depuis le début de l’épidémie, le ministère, le rectorat et la DSDEN ont ainsi totalement ignoré le droit du travail et les articles R4542-1 à -19 du Code du travail portant sur « L’utilisation d’écrans de visualisation » et qui obligent l’employeur : à évaluer les risques et à prendre les mesures pour remédier aux risques constatés ;
à organiser des pauses ou des changements d’activité réduisant la charge de travail sur écran ;
à adapter les logiciels, les systèmes, l’ergonomie ;
à encadrer les caractéristiques des claviers, des écrans, de l’espace de travail, du siège, ainsi que l’ambiance thermique ;
à assurer l’information et la formation des travailleurs sur les modalités d’utilisation de l’écran et de l’équipement de travail dans lequel cet écran est intégré ;
à surveiller l’état de santé des travailleurs par la médecine du travail.
Il va sans dire qu’aucune de ces obligations employeur n’a été appliquée. A la place, le ministère s’est contenté de protocoles qui n’ont pas respecté la législation du travail.
Par ailleurs, la question du travail sur écrans est révélatrice de l’absence de moyens budgétaires, et ce au détriment des personnels et des élèves. Ni ordinateur ni matériel n’ont été fournis par l’employeur afin d’assurer la continuité pédagogique ; les personnels continuent à se débrouiller seuls, sans plan de formation, avec leur matériel personnel, la plupart du temps sans aide ni service de maintenance informatique ; à la place, seule une indigente prime d’équipement informatique a été attribuée par le ministère. Ce qui semblerait tout à fait inacceptable et impossible à la plupart des salariés de ce pays est pourtant généralisé dans un ministère qui compte pas loin d’un million de salariés et qui a économisé 400 millions d’euros ces deux dernières années.
Les salarié.e.s de l’Education nationale n’ont donc quasiment rien à attendre de bon de ce gouvernement et de ce ministère et doivent compter avant tout sur eux/elles-mêmes. Nous terminerons donc en nous adressant directement à nos collègues, les travailleur.se.s de l’Education nationale. Ce sont avant tout nos combats collectifs, nos luttes démocratiques et nos résistances collectives qui permettront d’améliorer nos conditions de travail et de protéger notre santé physique, psychique et sociale. Pour paraphraser de célèbres vers composés il y a 150 ans mais qui n’ont guère vieilli, « Il n’est pas de sauveurs suprêmes,/ Ni Dieu, ni César, ni tribun,/ Travailleurs sauvons-nous nous-mêmes ! » Bien que le contexte social, politique et idéologique ne prête pas toujours à l’optimisme, partout des travailleurs et travailleuses, des citoyens et citoyennes luttent pour une société plus juste. Face à l’exploitation capitaliste qui creuse toujours plus les inégalités, qui précarise massivement, qui détruit la planète et qui dégrade la santé des travailleurs, nous voyons de nombreuses luttes de travailleurs et de travailleuses se construire pour exiger des conditions de vie dignes, comme celle des femmes de chambre de l’Ibis Batignolles. Face à la catastrophe climatique et environnementale en cours, nous voyons une partie de la jeunesse se mobiliser à travers le monde. Face à la domination patriarcale, nous voyons la parole des femmes se libérer et combattre les violences sexistes et sexuelles. Face au racisme et à l’extrême droite, nous voyons les citoyen.ne.s discriminé.e.s réclamer l’égalité réelle et lutter contre les violences raciales. Contre toutes les dominations à l’œuvre, qu’elles soient économiques, sociales, politiques, psychiques, sexuelles, culturelles, environnementales, l’émancipation des travailleur.se.s sera l’œuvre des travailleur.se.s eux/elles-mêmes.